La police française fait un usage excessif de la force lors des manifestations antigouvernementales
Pour tenter de réprimer une vague de rassemblements antigouvernementaux, la police française a « ressuscité » des méthodes et des armes controversées pour les utiliser contre les manifestants.
En mars, la police a été déployée en réaction à une manifestation de militants écologistes dans l’ouest de la France et à une vague de fureur publique déclenchée par la proposition controversée du président Emmanuel Macron d’augmenter l’âge de la retraite.
Le recours aux arrestations préventives pour dissuader les manifestations et recueillir des informations sur les militants, ainsi que l’emploi de mesures violentes de contrôle des foules, ont été dénoncés par des avocats et des défenseurs des droits de l’homme. L’envoyé des Nations unies pour les droits de l’homme et l’organe de surveillance des droits de l’homme de l’Union européenne ont tous deux mis en doute l’adéquation de la réponse de la police française et l’ont invitée à éviter d’utiliser des moyens coercitifs.
Seul un faible pourcentage des personnes arrêtées sont inculpées ; deux personnes sont toujours dans un état critique après avoir été arrêtées lors de la manifestation environnementale au réservoir de Sainte-Soline ; 286 manifestants ont été blessés ; l’un d’eux a perdu un œil et un autre un pouce. Toutefois, environ 1 050 policiers ont été blessés, en raison des tactiques de guérilla utilisées par certains manifestants.
Selon certaines voix, l’État a mis en place une politique qui dépasse le seuil de ce qui est autorisé pour priver les gens de leurs libertés et gérer les rassemblements de masse. Ces méthodes ont d’abord été largement utilisées avec le mouvement des gilets jaunes et suscitent aujourd’hui de vives inquiétudes.
Face à l’imprévisibilité de la situation lors des derniers événements, où une frange radicale des manifestants a agressé les policiers à coups de pierres et de bombes, l’administration a justifié l’action de la police comme étant nécessaire et légitime.
Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a déclaré catégoriquement que l’on ne pouvait pas parler de bavures policières. Il a ensuite expliqué que la police avait pour mission de faire respecter l’ordre public et de sauvegarder le droit de manifester, protégé par la Constitution. Pour défendre ses citoyens et leurs biens, l’État est légalement autorisé à faire usage de la force. Il a promis que les membres des forces de l’ordre qui feraient un usage excessif de la force ou qui désobéiraient à des instructions subiraient des répercussions.
M. Macron, qui est actuellement en train de défendre son plan de retraite, s’est présenté comme le protecteur de la loi et de l’ordre face à ce qu’il appelle les rebelles de « l’ultra-gauche ». Il a comparé ces rebelles aux émeutiers qui ont attaqué le Capitole des États-Unis il y a deux ans, tout en défendant les actions de la police.
Néanmoins, certains ont jugé disproportionné l’envoi de 3 200 policiers pour faire face aux quelque 6 000 manifestants de Saint-Soline. Des policiers en quad se sont précipités dans les champs alors que les manifestants lançaient des cocktails Molotov, en utilisant des gaz lacrymogènes et des pistolets LBD, qui tirent des balles en caoutchouc. Au moins une douzaine de personnes ont été aveuglées ou défigurées à la suite de l’utilisation de LBD pendant les gilets jaunes, ce qui a suscité des critiques à l’égard de leur utilisation.
La police française a été accusée d’avoir trop recours à la force et à l’intimidation et de ne pas adopter les stratégies plus axées sur la communauté utilisées dans d’autres pays. Sebastian Roché, chercheur en pratiques policières, affirme que le Royaume-Uni et l’Allemagne dispensent une formation sur la manière de désamorcer les situations par la communication avec les manifestants. Depuis 1985, cinq décès ont été enregistrés en France à la suite de manifestations, contre un seul au Royaume-Uni, au Canada, en Allemagne et en Italie.
Source: ft.com